Longtemps ramenée à son aéroport low-cost et à quelques clichés rapides, Beauvais révèle pourtant une trame urbaine singulière, travaillée par les reconstructions, les contrastes et l’audace architecturale.
Le visiteur attentif voit se croiser ici gothique vertigineux, héritage industriel reconverti, espaces culturels neufs et paysages du quotidien. Dans un week-end à Beauvais, vous passez d’un patrimoine historique hors norme à des créations numériques, reliant des sites incontournables à des lieux plus discrets où la ville actuelle affirme son ton.
Jusqu’où peut monter le gothique ? la cathédrale Saint-Pierre et ses horloges ne cessent d’étonner
Sous le ciel de Beauvais, la cathédrale Saint‑Pierre s’avance comme un vaisseau de pierre, inachevé mais souverain. Au cœur du sanctuaire, le chœur gothique record s’élance sous des voûtes à 48,50 mètres, hauteur vertigineuse qui fait vaciller les repères.
Derrière les piliers, un discret escalier mène à la salle des horloges, trésor mécanique parfois ignoré des visiteurs pressés. La monumentale horloge astronomique Vérité, construite entre 1865 et 1868 par Auguste‑Lucien Vérité, aligne dizaines de cadrans, automates et scènes animées racontant le temps des hommes et celui des astres. Plus ancienne, l’horloge à carillon médiévale rythme encore les heures, rappel sonore des artisans qui ont façonné la cathédrale.
MUDO – Musée de l’Oise : un palais d’évêques où l’architecture dialogue avec les collections
Face à la cathédrale, le MUDO – Musée de l’Oise occupe l’ancienne résidence des évêques, au pied des remparts de Beauvais. Derrière la porte cochère, le visiteur découvre le sobre palais épiscopal médiéval, puis une cour baignée de lumière qui conduit vers une élégante aile Renaissance en brique et pierre.
Les salles rénovées déroulent un parcours dense où dialoguent sculptures gothiques, objets liturgiques, arts décoratifs, et toiles du XIXe siècle. Au fil des cimaises, des paysages pré-impressionnistes de Corot, Huet ou Dupré fixent les ciels changeants de l’Oise, tandis que les céramiques d’Auguste Delaherche annoncent les audaces de l’Art nouveau.
Maladrerie Saint-Lazare, une mémoire du soin médiéval à parcourir en trois espaces
À l’écart du centre, la Maladrerie Saint‑Lazare étend ses bâtiments de pierre le long de la rue de Paris, dans l’ancien faubourg de Voisinlieu. Classé monument historique, cet ensemble hospitalier forme l’une des plus belles survivances de léproserie médiévale en France, structuré entre zone agricole, secteur d’accueil des malades et quartier des frères.
Le parcours conduit vers les bâtiments agricoles, où la vie quotidienne s’organisait autour des travaux des champs. Au centre, la vaste grange à charpente apparente devient aujourd’hui une nef laïque pour spectacles, expositions et résidences d’artistes. Plus loin, la sobre chapelle romane ouvre ses arcades plein cintre sur un jardin d’inspiration médiévale, partagé entre plantes médicinales, vignes et parterres dédiés aux malades.
Du fil au chef-d’œuvre, la manufacture de la tapisserie et le Quadrilatère rendent le savoir-faire vivant
Fondée en 1664 par Colbert, la Manufacture de Beauvais perpétue un savoir‑faire textile dont les ateliers demeurent actifs en plein cœur de la ville. Rattachée au Mobilier national, elle fait travailler des lissiers spécialisés dans la tapisserie basse-lisse, qui tissent, fil après fil, des pièces monumentales destinées aux palais de la République.
Les œuvres naissent à partir de cartons contemporains confiés par des artistes invités, dont les dessins sont transposés en laine et en soie dans un dialogue constant entre création et tradition. À proximité, le Quadrilatère accueille expositions et médiations du CIAP du patrimoine, qui éclaire l’évolution urbaine de Beauvais tout en exposant les liens entre tissu, architecture et mémoire des lieux.
Le plan d’eau du Canada, la pause nature des Beauvaisiens
Au nord de Beauvais, le plan d’eau du Canada occupe une ancienne carrière réaménagée en vaste zone verte autour d’un lac artificiel. L’ensemble forme une base de loisirs très fréquentée par les habitants, avec plages surveillées l’été, aires de jeux pour les enfants et pelouses dégagées tournées vers l’horizon aquatique.
Autour du plan d’eau, un anneau de 3 km bitumé offre un parcours souple aux joggeurs, cyclistes et marcheurs, ponctué de bancs et de points de vue sur la ville. Les berges accueillent une remarquable avifaune urbaine, mêlant canards, foulques, grèbes et hérons, dont les déplacements rythment les saisons au milieu des sports nautiques.
